Patrimoine & expertise
La SCI pour transmettre son patrimoine : une bonne idée ?
Très en vogue depuis quelques années, la SCI est une forme particulière de société civile qui permet de détenir des biens immobiliers. Ce mode d’organisation est souvent mis en avant pour optimiser la transmission de son patrimoine immobilier. Focus sur cette solution, pertinente dans bien des cas, à condition toutefois de bien l’utiliser…
Publié le 28 novembre 2022
C’est quoi une SCI ?
La société civile immobilière - dite SCI - est une structure fréquemment utilisée car elle permet de répondre à de nombreux objectifs :
- développer un patrimoine immobilier à plusieurs (on parle d’associés dans une SCI) ;
- mieux répartir les pouvoirs de gestion sur un bien détenu collectivement ;
- protéger une catégorie de personnes (enfant mineur, majeur protégé, concubin…) ;
- dissocier la propriété des biens (qui appartiennent à la SCI) et les pouvoirs sur les biens (exercés par le gérant notamment) ;
- obtenir des revenus faiblement fiscalisés grâce au choix du régime fiscal (impôt sur le revenu ou impôt sur les sociétés) ;
- et, surtout, anticiper et faciliter la transmission familiale de son patrimoine immobilier.
C’est ce dernier objectif qui sera particulièrement développé dans cet article.
Quel est l’intérêt de la SCI en matière de transmission ?
La SCI permet d’éviter que les bénéficiaires de la transmission (vos enfants, par exemple) ne se retrouvent en indivision sur le bien immobilier après votre décès. Si rien n’est fait, vos biens immobiliers appartiendront à l’ensemble de vos héritiers. Cette situation d’indivision est délicate car elle peut compliquer la gestion d’un bien, notamment si des décisions importantes doivent être prises. Les héritiers peuvent ne pas s’entendre et être obligés de vendre le bien transmis. Grâce à la SCI et à la rédaction des statuts (voir “Mettre en place une stratégie de transmission via une SCI”), vous évitez à vos héritiers d’éventuelles situations de blocage.
Avec la SCI vous pouvez aussi anticiper les “potentiels” conflits et prévoir une procédure d’agrément pour protéger la société et les autres associés. Grâce à cette procédure, l’entrée en société d’un nouvel associé (héritier notamment) devra être autorisée par les autres. S’il n’est pas agréé, l’héritier devra être indemnisé. Cela peut être utile, par exemple, si la société est constituée entre frères et sœurs, pour bloquer l’arrivée du conjoint et des enfants de l’associé défunt dans la structure.
Bien unique : la SCI pour réaliser une donation-partage
Une potentielle mésentente entre les héritiers lors du décès peut aussi être évitée en transmettant les biens avec une donation-partage. Ce type de donation permet d’anticiper la transmission de son patrimoine en “figeant” la valeur des biens donnés au jour de la donation et d’éviter les mésententes entre les héritiers au décès concernant la valorisation des biens donnés. Attention : pour que la donation-partage soit valable, il faut qu’il y ait un véritable partage des biens donnés. Vous ne pouvez donc pas donner un seul bien immobilier à vos enfants mais vous pouvez donner des parts sociales d’une société qui détient un seul bien immobilier : c’est tout l’intérêt de la SCI !
Si vous transmettez directement un bien immobilier (même une seule partie, ou la nue-propriété), vous perdez automatiquement certaines prérogatives car vous n’êtes plus l’unique propriétaire. Au contraire, en détenant le bien via une SCI vous pouvez conserver le contrôle des biens transmis.
Une clause pourra notamment être prévue dans les statuts pour que vous ayez le droit de vendre les biens, sans obtenir l’accord préalable de vos enfants.
Si les biens de la SCI sont des biens locatifs, vous pourrez continuer à percevoir des revenus en réalisant une transmission des parts sociales démembrées.
Fiscalité des revenus en SCI
Si le bien immobilier détenu en direct est loué non-meublé, vous êtes taxé à l’impôt sur le revenu (IR) dans la catégorie des revenus fonciers.
Avec la SCI, vous avez le choix de votre fiscalité : impôt sur le revenu (IR) ou impôt sur les sociétés (IS).
À l’IR, chaque associé acquitte alors sa fiscalité en fonction de son pourcentage de détention dans la SCI et de sa tranche marginale d’imposition.
À l’IS, la société est taxée sur son résultat (au taux de 15 % jusqu’à 38 120 € et 25 % au-delà pour 2022). En l’absence de distribution, les associés ne sont donc pas imposés, les loyers se capitalisant dans la société. Ils le seront uniquement s’ils choisissent de percevoir une partie des loyers grâce à une distribution de dividendes.
Mettre en place une stratégie de transmission via une SCI
Étape 1 : la création de la société
Pour créer une SCI, vous devez être au minimum deux associés (pas de maximum).
Les statuts de la société doivent être rédigés avec précaution car ils fixent les règles du jeu entre les associés, vis-à-vis des tiers, en cas de décès, etc. Recourez pour cela à un professionnel, notaire ou avocat.
Une fois les statuts rédigés, chaque associé doit réaliser un apport (immobilier ou en numéraire). Un gérant de la SCI sera nommé : il aura plus ou moins de pouvoirs en fonction de ce que précisent les statuts. On peut également prévoir des cogérants (personnes mariées ou pacsées, concubins, frères et sœurs…)
Étape 2 : l’investissement dans des biens immobiliers
La société peut acheter un ou plusieurs bien(s) immobilier(s) et faire un emprunt. Mais il est aussi possible de lui transférer la propriété de biens déjà détenus :
- soit en les apportant à la SCI,
- soit en les lui vendant.
Dans les deux cas vous devrez payer éventuellement une plus-value sur le bien immobilier.
Des biens… et des précautions à prendre
La SCI peut détenir des biens immobiliers locatifs, des biens professionnels mais aussi des biens immobiliers de jouissance (exemple : résidence principale, résidence secondaire).
Toutefois, les biens suivants nécessitent certaines précautions :
- les biens qui font l’objet d’un engagement de location souscrit dans le cadre d’un dispositif fiscal (Pinel par exemple) : le transfert pendant l’engagement peut entraîner la remise en cause de l’avantage fiscal octroyé ;
- la résidence principale : la détention en société peut lui faire perdre certains avantages civils et fiscaux que vous avez en direct (par exemple : abattement de 20 % prévu sur les droits de succession en faveur de certains héritiers) ;
- les biens loués meublés : la SCI doit être impérativement à l’impôt sur les sociétés.
Étape 3 : la transmission des parts
Vous transmettez les parts sociales, à vos enfants par exemple. La transmission doit être réalisée devant notaire, obligatoirement. Elle peut être réalisée en pleine propriété ou en démembrement. Là encore, la rédaction des statuts est primordiale pour bien encadrer les droits et pouvoirs de chacun.
Attention toutefois à conserver une part minimum en pleine propriété pour garder la qualité d’associé et le contrôle des biens !
La transmission entraîne une taxation éventuelle aux droits de donation. Vous pouvez éventuellement prendre en charge ces droits, pour le compte de vos enfants.
Étape 4 : Le fonctionnement de la société
La société civile impose certaines obligations comptables et fiscales que vous n’avez pas lorsque vous détenez les biens en direct. En tant que représentant de la société, le gérant doit réunir les associés au moins une fois par an (assemblée générale), tenir une comptabilité (pas obligatoire à l’impôt sur le revenu mais fortement conseillée), remplir une déclaration de résultat, etc. Là encore, un professionnel peut vous accompagner dans ces démarches.