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C’est toujours le bel âge pour l’assurance-vie, même après 70 ans
Passé 70 ans, la fiscalité du contrat d’assurance-vie apparaît moins avantageuse. Pour autant, ce placement ne perd pas de sa pertinence… à condition de prendre certaines précautions. Tour d’horizon des bonnes pratiques.
Publié le 04 avril 2022
Organiser avantageusement sa transmission
Le principal intérêt de l’assurance-vie est d’être un outil efficace de transmission à ses bénéficiaires. La fiscalité sur les capitaux transmis dépend de plusieurs paramètres, et principalement de l’âge de l’épargnant au moment des versements.
Pour les versements effectués avant 70 ans :
Chacun des bénéficiaires désignés peut recevoir jusqu’à 152 500 € de capitaux (versements + intérêts) sans payer de fiscalité. Au-delà, ils sont taxés à 20 % jusqu’à 700 000 € et 31,25 % pour le surplus.
Conseil : si vous n’avez pas encore 70 ans, il peut être opportun de verser sur un contrat d’assurance-vie afin que vos bénéficiaires profitent de cette fiscalité avantageuse.
Pour les versements effectués après 70 ans :
Pour les primes versées sur l’assurance-vie après vos 70 ans, les fonds transmis à vos bénéficiaires sont exonérés de taxation jusqu’à 30 500 €. Cet abattement est global, il se partage entre tous les bénéficiaires désignés sur tous vos contrats. Au-delà de cette somme, les fonds sont taxés aux droits de succession, en fonction du lien de parenté entre vous et chacun de vos bénéficiaires.
Bon à savoir : Pour les versements après 70 ans, la fiscalité reste avantageuse car vos bénéficiaires sont imposés uniquement sur les versements. Les plus-values réalisées sur votre contrat ne sont pas taxées, elles sont donc exonérées de fiscalité.
À noter : La fiscalité assurance-vie peut être plus favorable que la fiscalité successorale. C’est notamment le cas si vous souhaitez transmettre une somme d’argent à votre petit-enfant : vous pouvez lui transmettre 30 500 € sans taxation avec l’assurance-vie contre seulement 1 594 € par testament !
Versement avant ou après 70 ans : les + et les -
Avant 70 ans | Après 70 ans | |
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Avantages | Abattement de 152 500 € par bénéficiaire (sur les capitaux versés au bénéficiaire, c’est-à-dire primes versées + plus-values).
| Abattement de 30 500 € sur les primes versées (plus-values non taxées). Au-delà, application des règles successorales, selon le lien de parenté avec le défunt. À noter : sauf exception pour les contrats souscrits avant le 20/11/1991. |
Inconvénients | Imposition sur la valeur du capital perçu (prise en compte des plus-values). Au-delà de 152 500 €, taxation à des taux forfaitaires (pas d’application des règles successorales selon les liens de parenté, qui sont parfois plus favorables). | Abattement global à se partager pour tous les bénéficiaires, tous contrats confondus.
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Sachez que certains bénéficiaires sont exonérés de fiscalité, peu importe le montant transmis : c’est le cas de votre conjoint ou partenaire de Pacs. Cette exonération est aussi étendue à vos frères et sœurs, sous conditions.
La clause bénéficiaire dite « démembrée »
Il peut être judicieux dans certains cas d’opter pour le démembrement de la clause bénéficiaire. Elle vous permet de faire d’une pierre deux coups : vous transmettez un même bien deux fois successivement, à des bénéficiaires de générations distinctes, tout en maîtrisant la fiscalité liée. Explications.
Si vous souhaitez, par exemple, protéger votre conjoint tout en organisant la transmission au profit de vos enfants, vous pouvez désigner votre conjoint pour l’usufruit des capitaux décès et vos enfants pour la nue-propriété. À votre décès, votre conjoint (usufruitier) percevra la totalité des capitaux, qu’il pourra investir comme il le souhaite. Il aura la charge de restituer, à son propre décès, un bien de valeur équivalente à vos enfants (nus-propriétaires). Cette « dette » diminuera son actif de succession et viendra réduire le montant des droits de succession à régler pour les enfants. Pour cela, il est conseillé de mettre en place une convention de quasi-usufruit auprès de son notaire.
Si le démembrement de la clause bénéficiaire vous intéresse, parlez-en à votre conseiller, car elle ne constitue pas un choix pertinent dans toutes les situations. Sa rédaction requiert par ailleurs de nombreuses précautions, raison supplémentaire pour vous faire accompagner par un conseiller sur ce point.
Optimiser son épargne après 70 ans
Au-delà d’être un excellent outil de transmission, l’assurance-vie vous permet également de vous constituer une épargne, et de faire fructifier votre capital dans la durée.
D’ailleurs, même après 70 ans, vous pouvez diversifier l’épargne versée sur votre contrat d’assurance-vie, c’est-à-dire investir votre argent sur divers supports financiers présentant des caractéristiques différentes. Vous pouvez donc panacher sécurité et recherche de performance en fonction de votre tolérance au risque et de votre horizon de placement. Les arbitrages (transferts) d’un support à l’autre sont possibles à tout moment.
Pour en savoir plus
Ainsi, si vous souhaitez vous constituer un complément de revenus, l’assurance-vie est une solution opportune. L’argent investi sur votre contrat reste disponible à tout moment. Pour le récupérer, vous devez demander un « rachat » (un retrait) de tout ou partie de votre épargne. C’est lors de ce retrait que vous serez imposé sur les intérêts produits par votre contrat, et peu importe votre âge. La fiscalité en cas de rachat est la même que vous ayez plus ou moins de 70 ans.
En cas de retraits partiels, votre contrat d’assurance-vie continue d’exister. Vos rachats partiels vont avoir un impact sur la fiscalité que paieront éventuellement les bénéficiaires de vos capitaux décès… d’où certaines précautions à prendre :
- Privilégiez les rachats sur un contrat ouvert après vos 70 ans. Vous éviterez ainsi de « grignoter » les capitaux qui peuvent bénéficier de l’abattement de 152 500 € pour vos bénéficiaires.
- Après 70 ans, préférez la souscription de deux contrats à hauteur d’un montant équivalent :
- un premier contrat qui capitalise dans la durée, sans retrait ;
- un deuxième contrat qui pourra faire l’objet de rachats partiels réguliers.
Voici pourquoi :
Avec deux contrats sur lesquels vous versez 100 000 € chacun (le 1er contrat sans retrait et le 2ème avec retrait)
Sur le 1er contrat, supposons que sa valeur au moment de votre décès soit de 120 000 € (dont 20 000 € de plus-values)
Sur le 2ème contrat, supposons que sa valeur au moment de votre décès soit de 90 000 € (suite à vos retraits.)
=> Vos bénéficiaires profiteront d'un unique abattement de 30 500 € sur le cumul des 100 000 € versés sur le 1er contrat (les 20 000 € correspondant aux plus-values seront exonérés en totalité) et sur la valeur du 2ème contrat 90 000 € (cette valeur étant inférieure au montant des primes versées, c'est le montant revenant aux bénéficiaires qui doit être retenu).
L’assiette taxable globale pour vos deux contrats est donc de 159 500 € (100 000 € + 90 000 € - 30 500 €).
Avec un seul contrat de 200 000 €
La valeur de ce seul contrat avec les mêmes retraits que ceux réalisés ci-dessus est de 210 000 € (120 000 € + 90 000 €) au moment de votre décès.
=> Vos bénéficiaires profiteront alors d’un abattement de 30 500 € sur les 200 000 € versés. Les 10 000 € correspondant aux plus-values seront exonérés en totalité.
L’assiette taxable est donc de 169 500 € (200 000 € - 30 500 €)
« J’ai plus de 70 ans : dois-je continuer à verser sur mon contrat existant ou vaut-il mieux ouvrir un nouveau contrat ? »
Il est préférable d’ouvrir un nouveau contrat pour ne pas « polluer » vos contrats avec plusieurs versements qui n’appartiennent pas au même « compartiment » fiscal.
Une seule exception : si vous avez souscrit un contrat avant le 20 novembre 1991 car les versements effectués sur un tel contrat, même après vos 70 ans conserveront la même fiscalité (152 500 € d’abattement par bénéficiaire).
« Qui dois-je désigner comme bénéficiaire ? »
Tout dépend de vos objectifs, mais voici quelques optimisations possibles :
- Option 1 : vous souhaitez désigner un seul bénéficiaire pour tous vos versements avant/après 70 ans : il pourra au minimum recueillir 183 000 € sans fiscalité (152 500 € + 30 500 €) sauf s’il s’agit du conjoint ou du partenaire de Pacs. À noter : pensez à désigner un bénéficiaire successif dans l’hypothèse où le bénéficiaire serait décédé avant vous (et ainsi éviter que les capitaux n’intègrent votre succession).
- Option 2 : vous souhaitez désigner plusieurs bénéficiaires. Dans ce cas, il vaut mieux choisir :
- des bénéficiaires exonérés de droits de succession (époux ou épouse, partenaire de Pacs, frère ou sœur sous certaines conditions) sur votre nouveau contrat pour les versements après 70 ans,
- des bénéficiaires non exonérés de droits de succession sur les versements avant 70 ans : ils bénéficient ainsi d’un abattement plus important (152 500 € chacun contre 30 500 € à se partager).
Quels que soient votre situation ou vos projets, l’idéal est de vous rapprocher de votre conseiller afin d’évaluer ensemble les optimisations envisageables.